Situation ubuesque à l’assemblée : alors que le gouvernement annonce vouloir avancer rapidement sur la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), l’assemblée vote de multiples amendements lors du débat sur la souveraineté énergétique (proposition de loi “Gremillet”), dans un hémicycle quasi vide et donc propice aux surprises. Les députés, qui veulent être entendus, s’opposent à la volonté du gouvernement de publier le décret définissant cette trajectoire énergétique — ainsi que la répartition entre nucléaire et énergies renouvelables — avant même son adoption finale. Ainsi est voté le rétablissement des TRV gaz, la sortie des règles de fixation du prix du marché européen, l’établissement d’un monopole total d’EDF sur le nucléaire (incluant les petits réacteurs modulaires) ou la proposition du RN de relancer la centrale nucléaire de Fessenheim. Ce même groupe fait également passer son idée d’un moratoire sur les énergies renouvelables. Les amendements du gouvernement ont été rejetés.
–> L’ASNR (autorité de sureté nucléaire) a fait savoir que la centrale nucléaire de Fessenheim en démantèlement irréversible ne pourrait en aucun cas être remise en service.
–> Pendant ce temps, Enedis s’attend au raccordement de près de 6 gigawatts (GW) d’énergie renouvelable à son réseau en 2025, contre 5,5 GW en 2024 et 2 GW en 2020. Le solaire représenterait 80% de ces raccordements. Vous avez dits incohérences ?
À retenir : déjà très en retard (2 ans !), la PPE s’enfonce dans le flou avec des objectifs contradictoires et des bancs clairsemés pour un texte largement amendé qui affaiblit la stratégie énergétique du pays. Au delà des réactions de tous bords, un mix énergétique reposant sur le nucléaire et les énergies renouvelables, à défaut d’autres solutions réalistes, semble nécessaire pour lutter contre les énergies fossiles et assurer l’indépendance énergétique. Plusieurs projets EnR, la montée industrielle des technologies renouvelables (éolien en mer) et des dizaines de milliers d’emplois sont également à risque. Un vote en plénière doit avoir lieu demain, mardi 24 juin.
En bref :
- Nouveau nucléaire : EDF et l’État ont trouvé un accord sur le financement du programme nucléaire, incluant un prêt bonifié et un prix garanti de 100€/MWh. Ce projet, soumis à la Commission européenne, prévoit six réacteurs EPR2. L’accord suit l’arrivée du nouveau PDG et vise un coût total inférieur à 70 milliards d’euros. Question : est-ce que cet accord tiendra face aux soubresauts de l’assemblée ?
- Corrosion sous contrainte : alors que EDF affiche son optimisme sur les fissures trouvées sur certaines canalisations de la centrale nucléaire de Civaux, l’ASNR attend les résultats complets des analyses pour décider d’éventuelles nouvelles “actions à réaliser” sur le parc nucléaire. EDF indique que leurs nouvelles procédures ont permis de détecter la situation plus rapidement et permettront d’agir en conséquence.
- Baisse de production : avec la hausse des température, EDF devrait baisser sa production sur quelques centrales (sur le Rhône notamment) : l’idée est de ne pas augmenter en aval la température de l’eau pompée pour le refroidissement des centrales concernées au delà d’un seuil prédéterminé. Aucun impact sur la sécurité d’approvisionnement n’est attendu. Ce type de scénario qui était exceptionnel pourrait se reproduire beaucoup plus régulièrement dans le futur.
- Versement Nucléaire Universel : la CRE (Commission de régulation de l’énergie) publie son avis sur le projet de décret définissant une comptabilité spécifique des revenus nucléaires d’EDF, essentielle au calcul du Versement Nucléaire Universel (VNU – remplaçant de l’ARENH). Elle fixera les modalités de collecte des coûts d’EDF, prévoit une publication semestrielle et évaluera les seuils de taxation pour 2026, avant soumission à Bruxelles.
- Perspectives : après l’été, RTE présentera un scénario intitulé “mondialisation dégradée” dans le cadre du bilan prévisionnel 2025-2035, mettant en lumière l’impact d’une consommation électrique stagnante “et” et “sur” le développement de l’offre décarbonée.
- Scope 2 : vous remplissez le Scope 2 sur les émissions de gaz à effet de serre ? Et vous utilisez de la Garantie d’Origine (GO) ? Le “technical working group” du GHG Protocol pourrait demander l’alignement des GO électricité sur la consommation au pas horaire et l’annulation exclusive des GO provenant d’un réseau interconnecté avec le site de consommation final. Il s’agit de corriger des abus (GO n’ayant aucun lien avec le site de consommation, GO annulées l’année N alors qu’elles ont plus de 18 mois, utilisation d’électricité solaire la nuit…). Certains acteurs pensent que cet alignement temporel et géographique (physique) irait trop loin. La France demande déjà un alignement mensuel – faudrait il commencer par cette étape ?
- CEE : le ministre de l’Industrie et de l’Énergie, Marc Ferracci, a annoncé, le 15 juin, vouloir augmenter « d’un quart les niveaux d’obligation pour la période 2026-2030 par rapport à 2022-2025 du dispositif des certificats d’économie d’énergie” et de les orienter également vers la décarbonation de la mobilité.
Les marchés :
- Marché de gros de l’électricité : les prix de gros de l’électricité ne semblent pas réagir à la situation du moyen orient. Le marché a également pris une position attentiste suite aux annonces d’EDF sur son parc nucléaire (d’où la légère baisse d’une semaine sur l’autre). Les marchés de gros restent néanmoins 10% plus élevés qu’il y a un peu plus d’un mois. Par contre, la vague de chaleur fait grimper les prix au comptant et à très court terme (même s’ils restent très en dessous des 60€/MWh)
- Marché de gros du gaz : les marché de gros restent suspendus à la réaction de l’Iran sur le détroit d’Ormuz. Le Parlement iranien aurait décidé de la fermeture du détroit d’Ormuz : 25 % du GNL (Gaz Naturel Liquéfié) transite par ce passage. Il y a cependant une incertitude sur la mise en pratique de cette décision qui impacterait les alliés traditionnels de l’Iran. Pendant ce temps les livraisons actuelles de gaz naturel, qui restent confortables, amortissent la volatilité et permettent de contribuer à remplir les stockage. La France dépasse maintenant 60% de remplissage (55% en moyenne sur l’Europe).
Suivi des prix de marché de gros de l’électricité :
Baseload (€/MWh) :
Années | Clôture | ||
13/06/2025 | 20/06/2025 | ||
2026 | 68,79 | 67,48 | ↓ |
2027 | 65,20 | 63,93 | ↓ |
2028 | 67,08 | 66,13 | ↓ |
Suivi des prix de marché de gros du gaz :
Marché TRF (Trading Region France) (€/MWh) :
Années | Clôture | ||
13/05/2025 | 20/06/2025 | ||
2026 | 35,18 | 37,23 | ↑ |
2027 | 30,27 | 30,89 | ↑ |
2028 | 26,36 | 26,57 | ↑ |
👉 Rappel : deux nouveaux livres blancs disponibles au téléchargement
- “Comment réduire sa facture d’énergie en 2025” → télécharger le à cette adresse
- “Taxes sur l’électricité : comprenez la CSPE / TICFE et découvrez comment payer moins” → il est consultable en suivant ce lien
N’hésitez pas à nous contacter pour toute question relative à notre accompagnement sur ces deux sujets.